Sur le territoire de la Pévèle Carembault, certains lieux jouent sur plusieurs tableaux. Le domaine de Luchin en fait partie.

Bien connu des amateurs de football, il accueille aujourd’hui le centre d’entraînement du LOSC. Les passionnés de cyclisme savent également qu’il se situe à proximité immédiate de secteurs pavés emblématiques de Paris-Roubaix.

Mais réduire Luchin à ses seuls exploits contemporains serait passer à côté de l’essentiel. Derrière les terrains et les routes mythiques se dévoile un domaine ancien, façonné par des siècles d’histoire.

Crédits photo : Société historique du Pays de Pévèle

À la découverte du passé seigneurial de Luchin

Le Domaine de Luchin remonte probablement à l'époque mérovingienne et apparaît dans les biens de Gisèle, petite-fille de Charlemagne, lors de son mariage avec Eberhard de Frioul. À l’époque, le domaine comprenait une habitation sur motte entourée d’eau, jointe à une ferme.

Jusqu’à la Révolution française le domaine appartient à la seigneurie de Cysoing. Plusieurs familles se succèdent comme seigneur de Luchin depuis le XIIIesiècle. En 1602, un relevé de la châtellenie de Lille, parle du domaine comme une maison de plaisance, il a donc perdu sa fonction défensive.

En 1713, Romain T’Kint achète la propriété, avant qu’elle ne passe par donation à la famille de Brigode de Kemlandt en 1791. La famille Brigode conserve le domaine jusqu’au début du XXe siècle. D’ailleurs Le comte Pierre-François de Brigode assure les fonctions de maire de Camphin-en-Pévèle de 1813 à 1843.

Le château est reconstruit à plusieurs reprises, notamment par Romain T’Kint en 1722, puis considérablement agrandi par Pierre Oscar de Brigode de Kemlandt entre 1824 et 1848, le château compte alors jusqu’à 51 pièces.

En 1934, le château est une propriété de l’industriel du textile, Ernest Masurel. Après la seconde guerre mondiale, faute d’entretien le domaine décline. Il devient une colonie de vacances pour les enfants de la police, puis démoli en 1955. Des anciens édifices, seules subsistent quelques caves en briques avec un soubassement partiel en pierre de Tournai.

Sources et photos issues de la Société historique du Pays de Pévèle 

Crédits photo : Société historique du Pays de Pévèle

De la ferme médiévale à la ferme modèle du XIXᵉ siècle

La situation de l‘ancienne ferme accolé à la motte atteste de son ancienneté, c’est une disposition héritée de l’époque médiévale. Un acte de location de la ferme datant du 20 février 1726 à Pierre-François Gahide, laboureur à Camphin-en-Pévèle, nous apprend que la cense était constituée d’un étang, une maison, une cuisine, une cave, une grange, des étables, une bergerie, un pigeonnier, un carin, un fournil, une porcherie, un poulailler et d’autres édifices.

Après 1851, l’ancienne ferme est démolie pour laisser place à une nouvelle ferme modèle, construite plus loin, à l’orée du bois. Ce déplacement permet de créer un ensemble agricole plus vaste et fonctionnel, destiné à mieux administrer les terres environnantes appartenant aux Brigode.

La nouvelle ferme se présente sous la forme d’un quadrilatère de 88 m sur 65 m, avec quatre bâtiments disposés autour d’une cour centrale. La grange principale, en briques, dépasse 750 m². Les deux ailes latérales sont percées d’un porche central pour l’accès des chariots, tandis que l’aile en face de la grange abrite le logis avec deux petites extensions.

Aujourd’hui, des vestiges de l’ancienne ferme subsistent sous forme de communs, une longue construction de 58,30 m divisée en 17 travées, qui témoigne de l’architecture des XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles. Une chapelle, placée à l’entrée du domaine, a probablement été construite peu avant 1824, complétant cet ensemble agricole et patrimonial.

Sources et photos issues de la Société historique du Pays de Pévèle 

Crédits photo : Société historique du Pays de Pévèle

Reconversion : le domaine au service du sport professionnel

Après la démolition du château en 1955, le domaine de Luchin est délaissé. Faute d’entretien, les bâtiments se dégradent progressivement et le site est en partie vandalisé.

Au début des années 2000, le LOSC Lille Métropole est à la recherche d’un lieu unique permettant de regrouper l’ensemble de ses activités : équipe professionnelle, centre de formation, encadrement sportif et médical, direction et personnel administratif. Situé à la limite du territoire métropolitain, à proximité de l’autoroute A27, du stade et de la frontière belge, le domaine de Luchin apparaît comme un site stratégique.

À l’initiative de Michel Seydoux, alors président du LOSC, et avec l’appui de Michel Dufermont, maire de la commune, le domaine est acquis par le club en 2004. Un vaste projet de reconversion est engagé dès 2003, confié aux architectes Luc Delemazure, Jacques Salier et Denis Latour. Les bâtiments agricoles sont réhabilités et de nouvelles constructions contemporaines sont édifiées afin de répondre aux besoins du sport de haut niveau.

L’inauguration officielle du centre d’entraînement a lieu le 13 septembre 2007. En revanche, les vestiges très dégradés du château et des anciens communs sont entièrement détruits en 2010.

Aujourd’hui, le Domaine de Luchin est le centre de vie du LOSC, désigné comme la « Maison des Dogues », en référence à l’animal totem du club. Il regroupe les terrains d’entraînement, locaux de soins et de préparation physique, le centre de formation et les services administratifs. Implanté à Camphin-en-Pévèle sur un site d’environ 50 hectares. Il accueille quotidiennement 300 personnes :  joueurs, encadrants, personnels et prestataires dans un cadre associant activités sportives et environnement paysager.

Crédits photo : Société historique du Pays de Pévèle 

Entre patrimoine et exploits sportifs

Sur le territoire de Pévèle Carembault, le domaine de Luchin joue décidément sur plusieurs terrains. Si le football y occupe aujourd’hui une place centrale, le site s’inscrit aussi dans une autre grande page du sport, celle du cyclisme.

Adossé au domaine, le parcours de la mythique course Paris-Roubaix emprunte un secteur pavé appelé « pavé de Luchin » menant au légendaire Carrefour de l’Arbre. Classé cinq étoiles, ce secteur figure parmi les plus difficiles et les plus emblématiques de l’épreuve. Comme le domaine lui-même, ces pavés constituent un patrimoine à part entière, indissociable de l’histoire et de l’identité du territoire.

Pour aller plus loin, le domaine de Luchin fait l’objet d’un ouvrage publié en 2009 par la Société historique du pays de Pévèle, tandis que les secteurs pavés de Paris-Roubaix sont également à découvrir à travers un autre article consacré au patrimoine sur notre site.

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